Qualité de l’air intérieur : le classement A+ est-il sans danger pour la santé ?
Affiché sur tous les produits de décoration tels que les peintures, les parquets ou les papiers peints, l’étiquette des émissions dans l’air affiche un classement allant de C (fortes émissions) à A+ (très faibles émissions). Pourtant, ce classement ne suffit pas pour s’assurer d’un air sain chez soi. Un produit classé A+ peut même être nocif sur votre santé et celle de votre entourage. Découvrez dans la suite de cet article ce qu’est cet étiquetage obligatoire et ses limites.
A quoi correspond le classement A+ d’émissions dans l’air intérieur ?
Un étiquetage obligatoire en France
Face aux risques sanitaires d’une mauvaise qualité de l’air en intérieur, un étiquetage est obligatoire en France depuis 2012.
Ce label français concerne les produits de construction et de décoration à usage intérieur : peintures, papiers peints, cloisons, portes et fenêtres, parquets, moquettes, vernis, colles… et mesure les émissions dans l’air de certains composés organiques volatils (COV).
10 polluants visés par la classification
Pour définir le niveau d’émission, 10 polluants volatils sont mesurés : formaldéhyde, acétaldéhyde, toluène, tetrachloroéthylène, xylène, 1,2,4-triméthylbenzène, 1,4-dichlorobenzène, éthylbenzène, 2-butoxyéthanol, styrène, ainsi que la valeur totale de composés organiques volatils (COVT) émis par le produit.
Des substances identifiées par l’Observatoire de la Qualité de l’Air Intérieur comme nocives pour la santé car présentant un risque de toxicité par inhalation, allant de maux de têtes jusqu’à un risque de cancer pour le formaldéhyde par exemple.
La classification se fait en 3 étapes :
- identification des émissions du produit dans l’air
- calcul des concentrations d’exposition
- intégration du résultat final mesuré en µg par mètre cube
4 niveaux de classement
Le barème de classification des émissions dans l’air intérieur mesure la performance en 4 niveaux, allant de A+ (très faibles émissions) à C (très fortes émissions), avec pour chacun des valeurs limites d’émission à ne pas dépasser.
Zoom sur le classement A+
Les seuils du classement A+
Notre premier réflexe quand il s’agit d’acheter une peinture, en particulier pour une chambre enfant, est de choisir un produit classé A+.
Identifié comme le plus sûr par le label en matière d’émissions toxiques dans l’air, accepte jusqu’à 10 µg/m3 de formaldéhyde et 1000 µg/m3 de composés volatils au total (COVT).
Classe A+ | Classe A | Classe B | Classe C | |
formaldéhyde | < 10 | < 60 | < 120 | > 120 |
acétaldéhyde | < 200 | < 300 | < 400 | > 400 |
Toluène | < 300 | < 450 | < 600 | > 600 |
Tétrachloroéthylène | < 250 | < 350 | < 500 | > 500 |
Xylène | < 200 | < 300 | < 400 | > 400 |
Triméthylbenzène | < 1000 | < 1500 | < 2000 | > 2000 |
1,4-Dichlorobenzène | < 60 | < 90 | < 120 | > 120 |
Ethylbenzène | < 750 | < 1000 | < 1500 | > 1500 |
2-Butoxyéthanol | < 1000 | < 1500 | < 2000 | > 2000 |
Styrène | < 250 | < 350 | < 500 | > 500 |
COVT | < 1000 | < 1500 | < 2000 | > 2000 |
Le cas du formaldéhyde
Parmi les 10 polluants considérés par l’étiquetage, le formaldéhyde ou formol est génotoxique et classé cancérogène certain par le CIRC. On en retrouve en particulier dans les parquets stratifiés mais aussi dans les peintures, les colles et les vernis.
Afin de caractériser le lien l’exposition à une substance et un effet nocif observé, l’Agence nationale de sécurité sanitaire définit ce qu’on appelle des valeurs guides de qualité de l’air intérieur. Depuis le 1er janvier 2023, l’Anses a baissé la valeur guide d’exposition prolongée au formaldéhyde à 10 µg/m3.
Une valeur qui équivaut à la tolérance du classement A+ mais pour un produit unique, sachant qu’il faut prendre en considération non pas un seul élément mais l’ensemble des produits d’ameublement et de décoration d’une pièce.
Des tests effectués au bout de 28 jours
Contrairement à l’utilisation courante qui en est faite, la classification porte sur les émissions générées 28 jours après application, sachant que les pics d’émissions de COV sont principalement présents quelques jours après l’application.
Sur les quantités admises, le taux de COVT n’est que de moitié par rapport à la classe C+.
Pourtant, si le niveau C est la moins bonne classification, c’est aussi la limite d’autorisation d’un produit. Ceux dont les émissions sont supérieures au niveau C sont tout simplement interdits à cause de leur risque sanitaire.
Les différences avec les autres éco-labels
L’étiquette de classification des émissions dans l’air intérieur ne concerne que celles générées par le produit, pas les COV contenus dans le produit lui-même, au contraire d’autres écolabels.
Les limites du classement A+ des émissions dans l’air intérieur
Des niveaux d’émissions encore trop élevés
Ce n’est pas parce que la lettre A+ est écrite en vert sur le label qu’il est irréprochable. En effet, si choisir un produit A+ est plus sûr qu’un C, c’est avant tout un label de sensibilisation. Le seuil de 1000 µg/m3 est trop élevé, et tous les produits classés A+ ne se valent pas.
Des polluants non pris en compte
L’étiquetage concerne 10 substances polluantes ainsi que la quantité totale de composés organiques volatils (COVT) au bout de 28 jours, mais certains polluants ne sont pas pris en compte par ce classement : les Composés organiques semi-volatils (COSV).
Des substances, dont certains sont des perturbateurs endocriniens, qui font l’objet d’une attention croissante depuis une dizaine d’années car ils sont suspectés d’avoir des effets nocifs sur le système nerveux et le système immunitaire.
A+ au minimum
Si le classement A+ n’est pas parfait, il est un pré-requis quand on choisit un produit de construction ou de décoration.
Disons que c’est le premier niveau de sélection en évitant à tout prix les produits classés A, B ou C, en particulier pour les enfants et les femmes enceintes, plus sujets aux risques causés par les COV.
Considérer l’évolution des émissions
Les autres éco-labels à connaître
La classification A+ d’un produit ne concerne que son niveau d’émissions dans l’air intérieur et aucunement sa qualité ou son impact environnemental.
En effet, une peinture classée A+, même avec des niveaux d’émissions considérés comme faibles, peut être fabriquée avec des substances nocives pour l’environnement. Il est donc important de regarder la certification par d’autres écolabels. Par exemple EU Ecolabel ou NF Environnement.
Si l’étiquetage obligatoire a permis de sensibiliser à la question de la qualité de l’air intérieur, il trouve aujourd’hui ses limites avec des niveaux d’émissions encore trop élevés pour le classement A+, induisant en erreur les personnes souhaitant prendre soin de leur santé ou celle de leur entourage. Choisir un produit classé A+ ne doit pas être une fin en soi, mais plutôt un pré-requis pour limiter l’exposition à des substances toxiques dans l’air, en particulier des plus jeunes.